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Le 22 décembre 1992, il y maintenant 30 ans, l’Assemblée générale des Nations Unies a reconnu la date du 17 octobre, comme Journée internationale pour l’élimination de la pauvreté.

Qu’avons-nous gagné avec cette Journée, de quelles réalisations sommes-nous particulièrement fiers ?

1 – Accroître la fierté, la dignité et la crédibilité

Le 17 octobre, des personnes partout dans le monde, découvrent qu’elles ne sont pas seules, que leur combat est universel. Elles se lèvent et parallèlement elles mettent en route la société.

« La journée du 17 octobre m’a permis de rencontrer des autorités locales, des députés. J’ai pris la parole et j’ai été entendu par des personnalités que je n’avais jamais imaginé rencontrer. Je suis fier de toutes les fois où nous nous sommes rassemblés pour imaginer un monde plus juste et égalitaire. » Emile C., (Familles solidaires, ATD RDC)

« Cette journée a permis de donner une grande légitimité aux prises de paroles des personnes qui sont les premières concernées. C’est une journée de l’espoir, du partage du vécu et qui montre que vivre dans la dignité est possible. » (Collectif France Refuser la Misère)

« Nous sommes fiers de toutes les célébrations, car elles ont donné place et parole aux plus oubliés de la société. Ils se sont exprimés, ils ont pris la parole jusqu’aux instances internationales. C’est une victoire pour chaque année. » Christian R., (universitaire Congolais en Inde)

« Au Guatemala, des personnes issues de familles vivant dans l’extrême pauvreté ont pu accéder au Palais National du Gouvernement grâce à l’événement ‘‘Cambio de la Rosa’’, de sorte que, par leur lutte quotidienne, dans des conditions précaires, elles peuvent être considérées comme des bâtisseurs de paix ». Max A., (Comité international 17 octobre, Guatemala)

2 – Le courant du refus de la misère grandit et mobilise

Le réseau de personnes qui combattent la misère s’accroît et prend de plus en plus d’importance. Cette journée fait connaître la misère et surtout les acteurs qui luttent pour l’éradiquer. Lors de cette journée du 17 octobre, les populations locales se mobilisent avec les différentes associations. Ces actions font connaître cette lutte et donnent de l’espoir : la misère n’est pas une fatalité.

« D’année en année, le message de ceux qui ne sont pas entendus atteint de plus en plus de personnes. Comme nous célébrons cette journée au Bangladesh depuis quelques années, nous avons également constaté que les jeunes deviennent plus actifs à cet égard en connaissant et en célébrant cette journée. » MATI Bangladesh.

« Avec la célébration de la journée du 17 octobre, FERAPAD, notre association, est fière d’avoir mobilisé les communautés pour la mise en place d’un poulailler. De cette action, deux extensions ont vu le jour, non sans difficultés. Nous sommes fiers d’avoir profité de la journée du 17 octobre pour doter les femmes des communautés rurales de Fizi d’un mécanisme local d’autonomisation financière. » Stanislas W. K., ( Bujumbura, Burundi)

« Nous avons gagné en travail d’équipe et nous avons fait attention à chacun dans sa réflexion et dans la construction d’une dynamique commune. Nous avons aussi vulgarisé la journée dans notre pays et mieux structuré la question de la pauvreté. » Blaise N., (Yaoundé, Cameroun)

« Je pense qu’il y a une prise de conscience croissante du fait que la pauvreté est un fardeau commun à toute la société. Cela est en partie dû à la mobilisation du 17 octobre – qui, chaque année, aide à mieux faire comprendre ce qu’est la pauvreté. » Gideon A., (Nigeria)

« Ce qui est nommé existe. Ainsi, peu à peu, la pauvreté est vue, nommée et existe dans la société. Plus nous la nommerons, plus nous aurons la responsabilité de contribuer à l’éradiquer.[…] Lorsque les pauvres passent de la périphérie au centre de leur société, cela commence à changer la corrélation des forces qui ont été historiquement établies entre les différents secteurs sociaux. Lorsque les personnes en situation de pauvreté commencent à avoir un sentiment d’appartenance, à s’exprimer, cela change les sociétés de génération en génération. » Carolina E., (Comité international 17 octobre, Guatemala)

3 – Influencer les décideurs

La journée du 17 octobre représente une grande occasion de faire parvenir la voix des plus pauvres aux grands décideurs et aux institutions qui agissent contre l’extrême pauvreté.

« Lorsque Joseph Wresinski a introduit l’idée de la relation entre les Droits de l’Homme et la misère, cela a constitué un changement crucial dans la façon de penser l’approche de la pauvreté. C’était tellement visionnaire… personne n’avait fait ce lien entre misère et Droits de l’Homme. Cette approche a influencé la pensée au sein des Nations unies et on voit que cela prend de l’ampleur… la participation des personnes en situation de pauvreté a augmenté au fil du temps. » (Donald Lee, président du Mouvement international ATD Quart Monde)

« À travers cette journée nous sommes arrivés à mobiliser des décideurs à prendre en compte dans leur programme la question de l’accès des personnes pauvres à l’eau potable et à l’assainissement. » (Hassimi S., Seepat, Burkina Faso)

« En France, cette journée a permis de : Contribuer aux votes de lois pour les plus pauvres (RMI, CMU, …) – Créer un collectif d’associations ensemble pour porter la parole de ceux qui l’ont peu ou ne l’ont pas (ex : collectif ALERTE, PPV, Collectif du 17 oct) – Sensibiliser aux questions de grande pauvreté et faire évoluer le regard – Médiatiser, rendre visible, marquer les consciences et permettre un engagement.» (Collectif France « Refuser la misère »)

4 – Les défis

Cependant la lutte contre la misère reste un défi d’une ampleur conséquente. En effet, il reste encore dans le monde beaucoup d’endroits où les gens vivent en situation de grande pauvreté et où leur dignité n’est ni respectée ni assurée. Nous devons encore nous unir, nous entraider et apprendre chacun les uns des autres.

« S’il est vrai qu’il y a eu des avancées, il faut aller beaucoup plus vite. Il n’est pas possible que des pays riches aient été vaccinés alors qu’il n’y a pas assez de vaccins dans les pays plus pauvres. Il n’est pas possible que certains millionnaires montent dans une fusée pour faire du tourisme pendant que des gens meurent par manque d’oxygène. » (Sylvie D., Mano a Mano, PEROU)

« Des efforts ciblés vers l’inclusion et le fait de ne laisser personne de côté, […] la dignité et l’inclusion de tous dans les efforts d’élimination de la pauvreté sont devenues un objectif prioritaire que nous efforçons d’atteindre. » (Jyoti T., NEPAL)

« Quand on se demande ce qu’on a gagné, je me rappelle de Pérez de Cuellar qui disait « vous êtes nos yeux et nos oreilles ». Mais qu’est-ce qu’ils en font, de ces oreilles et de ces yeux ? On peut faire des séminaires et des rapports, mais comment obliger les nations à appliquer ce qu’ils entendent des plus pauvres ? Avec le 17 octobre, il y a de plus en plus de conscience et de connaissance de ce qu’est la grande pauvreté, mais qu’est-ce qu’on en fait ? On ne voit pas de liens entre les plus pauvres et les grandes préoccupations du monde. » (Bernard M. et Jean T., Comité international 17 octobre)

« C’est une question que je me pose beaucoup ces derniers temps : est-ce que la manière dont on célèbre le 17 octobre aujourd’hui, est celle qui correspond à ce qu’on a imaginé à l’origine ? » (Nicolas D., Belgique)

La phrase inscrite sur la Dalle commémorative en honneur des victimes de la misère reste donc un appel actuel et urgent !

« Là où des hommes sont condamnés à vivre dans la misère,
les droits de l’Homme sont violés, s’unir pour les faire respecter est un devoir sacré. »

Père Joseph Wresinski